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Dracula, lecture rock dans la veine de Bram Stocker

Lecture musicale dans le désir d’exposer le plus clairement les éléments terrifiants du roman. La tête fragile du spectateur étant sujette à tant d’interprétations, peu d’accessoires, ni capes noires ni bougies : l’hémoglobine est dans la chanson. Celle de Theo Hakola.

On parlera bien sûr du fameux comte dans son château des Carpates et de l’extension immobilière à laquelle il songe, nous sommes en 1890, émigré de Hongrie désireux d’étendre son empire dans l’Empire britannique, il vise Londres, cœur palpitant du capital. On parlera peu du jeune notaire Jonathan Harker, victime de l’hospitalité du comte. Mais de ses amies directes et, indirectes Mina et Lucy on parlera, pénétrant jusqu’à leur carnet intime. Des êtres nocturnes, oiseaux et autres souris volantes, nous parlerons, ainsi que des liaisons infectieuses qu’ils entretiennent. Donc, des soins innombrables, des docteurs, de leur bravoure et du sacrifice. On n’évitera pas la question des non-morts et de leur possible propagation jusqu’à nos jours. Des remèdes préconisés et d’un recours possible contre la catastrophe ; nous parlerons enfin. Sans fard et sans prothèse dentaire.

« Mon ami, bienvenue dans les Carpates. Je vous attends avec grande impatience. Dormez bien cette nuit. La diligence partira demain après-midi à 3 heures précises ; une place vous y est réservée. Je suis sûr que votre voyage depuis Londres s’est bien passé et que vous apprécierez votre séjour dans mon magnifique. » — Votre ami, Dracula.

Article dans Froggy

« Une lecture avec le comédien Jacques Bonnaffé ne ressort jamais ni du conventionnel ni de l’anodin et quand sa fulminance élocutoire rencontre le folk-rock alternatif de Theo Hakola sur le thème du vampire, la lecture qualifiée de musicale tient de l’exercice performatif source d’une saisissante expérience pour l’auditoire. Leur collaboration artistique concerne une des œuvres emblématiques de la littérature dite gothique née outre-Manche au XIXe siècle, le Dracula de Bram Stocker pour un spectacle créé à l’occasion de l’exposition Vampires, de Dracula à Buffy présentée à la Cinémathèque française.

« Et ils présentent une et non pas la lecture de l’opus original, d’autant que celui-ci revêt la forme épistolaire pâtissant souvent de la transposition scénique.

« À l’instar de l’intitulé, Dracula, dans la veine de Bram Stocker, et nonobstant son jeu de mots, elle constitue une approche narrative subjective, et néanmoins fidèle, du périple transylvanien du protagoniste, le jeune clerc de notaire, Jonathan Harker, missionné auprès du comte Dracula pour organiser son séjour londonien, de la vampirisation de sa fiancée Mina et de son amie Lucy et de la lutte contre la porphyrie.

« Jacques Bonnaffé déboule sur la scène quasiment plongée dans le noir hors un halo rouge, rouge sang bien évidemment, en éructant contre la mort, incarnation moderne du vampire sous les nappes sonores samplées par Theo Hakola.

« Mais très vite, il se débarrasse de cet oripeau pour devenir un conteur démonstratif, presque agité qui contraste avec le musicien, grande silhouette élégante vêtue de noir, aux lents et silencieux déplacements de félin.

« Et comme indiqué dans sa note d’intention, il n’y aura ni capes noires, ni bougies, ni prothèse dentaire, quant à l’hémoglobine, elle est dans la chanson de Theo Hakola dont les compositions délivrées avec sa voix grave et incantatoire pourraient être comparées à une fusion entre la noirceur envoûtante de Nick Cave et les riffs de Ry Cooder ; mais un moment halluciné allant crescendo jusqu’au combat final porté par un exceptionnel comédien. »